🔮 [Digne d’intĂ©rĂȘt] : Les Peulhs ne sont pas des terroristes mĂȘme si beaucoup de terroristes sont Peulhs (Tribune de Paz Hien)

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Ceci est une une tribune de Paz Hien, juriste et analyste politique sur la question de la stigmatisation de la communautĂ© peule dans le contexte actuel de lutte contre le terrorisme au Burkina Faso. Un discours stigmatisant peut-ĂȘtre un terreau fertile au terrorisme selon le juriste qui ajoute que les peulhs sont aussi victimes du terrorisme. Il recommande aux leaders peulhs de prendre position et de sensibiliser les membres de leur communautĂ© sur le combat Ă  mener. « Laisser cette tĂąche aux seuls Leaders peulhs est aussi une autre forme de stigmatisation » prĂ©vient-il.

L’intĂ©gralitĂ© Ă  lire ici👇👇👇👇👇

 

Cela a Ă©tĂ© dit et repĂ©tĂ© Ă  maintes reprises. Certains ont fini par comprendre et changer leur perception et leur langage; d’autres ont compris mais ont refusĂ© de changer leur langage en toute mauvaise foi. Enfin certains n’ont toujours pas compris et c’est Ă  eux que je souhaite m’adresser car j’estime que c’est mĂ©chant de laisser les peulh se dĂ©fendre seuls face Ă  toute cette vague de stigmatisation; c’est une autre forme de complicitĂ© Ă  leur supplice. C’est aussi vrai par ailleurs qu’il y’a des peulh non-terroristes mais dont le langage ne facilite pas la dĂ©fense des peulh innocents face au terrorisme.

Mon postulat est un devoir humain et humaniste face au risque d’un pĂ©ril grave et imminent si le risque n’est dĂ©jĂ  pas consommĂ©. N’Ă©tant pas peulh et n’ayant pas d’alliance familiale quelconque avec les peulh, on ne me reprochera pas de dĂ©fendre des intĂ©rĂȘts partisans surtout quand on sait que d’oĂč je viens, ma communautĂ© a eu plusieurs dĂ©mĂ©lĂ©s avec la communautĂ© peulh.

Oui, la majorité des terroristes connus sont des peulh (référence faite aux jugements des tribunaux et aux listes de personnes recherchées et aux résultats des opérations militaires).
La gendarmerie nationale du Burkina estime Ă  entre 2000 et 3000 combattants terroristes sur le sol burkinabĂš. ExagĂ©rons en allant Ă  10.000 combattants et supposons qu’ils soient tous peulh. Sachant que nous avons entre 2 et 3 millions de peulh au Burkina, cela reprĂ©sentent moins de 0,5% de cette communautĂ©. Que faisons nous des 99% ? On les rend tous complices? Imaginez 25% qui…non je n’ose pas y penser.

La vĂ©ritĂ© est la suivante: Une petite minoritĂ© de peulh se sont engagĂ©s dans le terrorisme en y Ă©tant initiĂ©s par des forces extĂ©rieures qui ont exploitĂ©s leurs douleurs et revendications pour les radicaliser. Cette minoritĂ© a obligĂ© des familles peulh Ă  engager leurs enfants sous peine d’ĂȘtre tuĂ©s et d’autres ont vu leurs biens confisquĂ©s. Ce sont les premiĂšres victimes du terrorisme. Ces victimes ont Ă©tĂ© sommĂ©es de couper tout lien avec les forces loyalistes. Celles qui ont contrevenu Ă  ces injonctions ont Ă©tĂ© tuĂ©es. Oui, beaucoup ne le savent pas, mais des civils peulh ont Ă©tĂ© tuĂ©s par des terroristes peulh, donc des terroristes tout court.

Dans certaines familles, des enfants ont Ă©tĂ© enrolĂ©s par les terroristes Ă  l’insu des parents, tout comme en ville ici des parents sont surpris qu’on vienne leur dire ce que leurs enfants font dehors.
Ces enrolĂ©s vont combattre dans des zones et reviennent sans que leurs proches ne sachent, pendant que leurs familles les croient totalement innocents. Et il peut arriver donc qu’ils soient pistĂ©s et retrouvĂ©s dans une famille. Si le pisteur manque de discernement, il pourrait s’en prendre Ă  toute la famille faisant ainsi des innocents.
Lorsque la famille dĂ©couvre, elle est immĂ©diatement menacĂ©e de mort par le concernĂ© non sans que ce dernier n’ait essayĂ© d’embarquer tout le monde. Les cas comme yirgou et autres (oĂč il y’a eu beaucoup de victimes civiles) sont utilisĂ©s pour radicaliser les proches en leur disant que de toutes les façons s’ils refusaient, le camp adverse (les forces loyalistes) les tueraient tous Ă  l’occasion.

La proximitĂ© ethnique et religieuse est la principale approche des terroristes. Et les principaux arguments sont la marginalisation de la communautĂ©, la stigmatisation de celle-ci et la prĂ©sentation d’une mission divine avec un boost de finance.

On comprend alors que tenir un discours stigmatisant peut ĂȘtre un terreau fertile au terrorisme, tout le contraire de ce qu’on vise comme objectif.

Au contraire le discours devrait tendre Ă  encourager les peulh Ă  rester dans la rĂ©publique et Ă  compatir Ă  leurs supplices puisqu’ils souffrent aussi.

Est-ce que certains savent qu’il y’a des peulh FDS qui luttent contre le terrorisme, qui aident Ă  traduire les messages de certains HANI, qui servent de guides dans certains endroits et qui sont des agents du renseignements?

Oui les leaders peulh doivent clairement prendre position contre le terrorisme et sensibiliser les membres de leur communautĂ© sur le combat Ă  mener. Mais ils doivent le faire au mĂȘme titre que tous les leaders communautaires dans le pays qu’ils soient religieux, ethniques, politiques ou d’opinion. Laisser cette tĂąche aux seuls leaders peulh est une autre forme de stigmatisation.

Ce que je souhaite que vous reteniez de ce long post que je n’ai pas l’habitude faire:

Les Peulh ne sont pas des terroristes mĂȘme si beaucoup de terroristes sont peulh. Les peulh sont aussi victimes du terrorisme.

Paz Hien
Juriste et analyste politique

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